L'avenir de nos légumes et de nos céréales

L'avenir de nos légumes et céréales
En France, le catalogue des espèces et variétés de plantes cultivées est créé en 19321, et géré par le Comité de contrôle des semences. Il permet d'éviter, dans la profusion de semences, que les différentes variétés soient vendues sous le même nom, ou qu’une même variété ait des appellations différentes. Il clarifie l’offre et protège l’utilisateur qui est ainsi assuré de l'identité de la semence qu’il achète. Avant la création du Catalogue la réglementation s'appuyait sur la création d'une station nationale d'essais de semences en 1884 et sur la loi sur la répression des fraudes de 1905; le premier règlement concernant une semence fut l’arrêté du 13 avril 1934 concernant la pomme de terre. (II faut rappeler aussi la réglementation sur les hybrides producteurs directs).
Le blé fait l'objet d'un premier catalogue de variétés en 19332, puis l'avoine (1934), l'orge (1937), la pomme de terre… Les espèces potagères (1952), la vigne (1960) et les espèces fruitières (1961)2.
En 1942, le Comité de contrôle des semences est remplacé par le Comité technique permanent de la sélection (CTPS), composé de représentants des semenciers, de la recherche et de l’État. Il est chargé de la gestion du Catalogue.
D'après le décret du 11 juin 1949, seules peuvent être commercialisées les semences issues de variétés inscrites au Catalogue officiel (cependant l'utilisation de semences non inscrites est toujours permise, pour autant qu'elles ne sortent pas de la ferme). Quelques espèces, les espèces dites "non réglementées", comme le millet, échappent toutefois aujourd'hui encore à cette obligation; l'asperge de "non réglementée" est devenue une espèce réglementée en 19953.
Le décret du 22 janvier 1960 permet d’exclure du Catalogue des variétés inscrites auparavant lorsqu’elles ne répondent plus aux nouveaux critères. En outre, il limite à 10 ans la durée de l’inscription des variétés au catalogue et en renforce les épreuves d’admission.
La dernière version de cette réglementation date du Décret 81-605 du 18 mai 1981, (J.O. Du 20 mai 1981). Il stipule que : « Le ministre de l’agriculture tient un catalogue comportant la liste limitative des variétés ou types variétaux dont les semences et plants peuvent être mis sur le marché sur le territoire national. L’inscription sur le catalogue est subordonnée à la triple condition que la variété soit distincte, stable et suffisamment homogène». Ce décret est « pris pour l'application de la loi du 1er août 1905 sur les fraudes et falsifications en matière de produits et services, en ce qui concerne le commerce des semences et des plants ».
Les arrêtés du 22 juillet 1992 et du 30 août 1994 créent des listes de variétés à usages industriels réservés dérogeant aux règles classiques d’inscription.
Le Catalogue officiel français comporte deux listes principales, distinctes : liste A : variétés dont les semences peuvent être commercialisées en France ; liste B : variétés dont les semences peuvent être multipliées en France en vue de leur exportation hors de l’Union Européenne.


Test DHS
DHS pour "Distinction, Homogénéité, Stabilité" prouvant que la variété proposée est distincte des variétés existantes (donc nouvelle), homogène (constituée de plantes identiques) et stable ("si elle conserve, pendant sa durée de commercialisation, ses caractéristiques telles que décrites au moment de l'homologation de la variété. Une façon de vérifier si une variété est stable consiste à comparer régulièrement les lots de semences qui circulent à l'échantillon de référence détenu par le GEVES, et de vérifier si les lots sont identiques à la référence ou pas"4).


Le droit français laisse libre à tout un chacun de semer et récolter pour sa consommation ou son usage personnel toutes espèces végétales, hors espèces considérée localement comme nuisibles ou pouvant porter atteinte à l'équilibre écologique local. De même, tout jardinier amateur peut récolter des semences, issues de sa propre culture à toutes fins de culture ultérieure sans en avoir à référer à quiconque, y compris aux possibles ayants droit de l'espèce inscrite dont seraient issues les semences. En revanche, le droit français interdit la vente de ces semences, de même que les échanges de semences entre paysans, qui sont assimilés par le Ministère de l'agriculture à des ventes dissimulées8. Cette disposition est interprétée comme "disproportionnée" par l'avocat général de la Cour de Justice Européenne de Luxembourg dans l'affaire C-59/11 Association Kokopelli contre Graines Baumaux SAS9. Mais les juges ne sont pas tenus par l'avis de l'Avocat Général, comme d'ailleurs en droit interne français.
Certains acteurs (associations et groupements de paysans) estiment que ce Catalogue n'est pas adapté à toutes les réalités du monde agricole, pouvant même nuire à la sauvegarde de la biodiversité, de même que les dispositions récentes imposant des provenances certifiées (perte de diversité génétique) pour les plants forestiers destinés aux plantations paysagères ou à la sylviculture10 .
Par ailleurs, ils estiment que le coût de l’inscription (pour une variété de céréales : plus de
 6 000 €, auxquels il faut ajouter le maintien au catalogue : plus de 2 000 € pour les 10 premières années) dissuade l’inscription des variétés issues de sélections paysannes qui concernent des volumes limités.
Dissensus : différents acteurs ont des conceptions parfois opposées de la notion de qualité des semences, et des plantes ; les uns la conditionnant à une stabilité des caractéristiques variétales et donc du génome (ce qui facilite la standardisation), les autres appréciant au contraire des variétés plus souplement adaptables à des biotopes et des contextes changeants, ce qui peut se traduire par une moindre fixité des caractères de la variété mais compensée par une plus grande diversité génétique et résilience agro-écologique.
Enfin, les détracteurs du catalogue tel qu'il est conçu, arguent aussi que le catalogue officiel contribue à la confiscation ou privatisation du vivant, au détriment des plus pauvres (y compris notamment en France), et au profit des entreprises multinationales de l'agroalimentaire.
On peut se poser la question de savoir si on pourra, d’ici quelques années, avoir encore le droit de faire son potager


Pourquoi une banque de semences



BECHET Laurent